Si vous êtes ici, c’est que vous avez déjà entendu ce mot « biotech » ou « entreprise de biotechnologie » et que vous voulez en savoir plus : vous êtes au bon endroit !
Dans cet article, on va illustrer la grande diversité des entreprises qu’on peut classer dans la catégorie « biotech » qu’on va séparer en 5 grandes familles dont je vais faire la présentation dans les grandes lignes. L’ordre de présentation de ces familles se fera tout simplement en commençant par celles que je connais le moins en finissant par celles que je connais le mieux (les biotech thérapeutiques) et qui sont le focus principal de ce blog.
Biotechs industrielles
Elles utilisent la biologie pour produire des matières premières industrielles, typiquement en utilisant la fermentation (comme pour la bière), à partir de souches de levures ou de bactéries génétiquement modifiées. On peut en théorie fabriquer une diversité quasi infinie de molécules de cette façon. Il peut s’agir de carburants, de précurseurs pharmacologiques (les briques chimiques qui vont servir à synthétiser des médicaments), de protéines de remplacement pour certaines maladies rare, d’anticorps monoclonaux ou de vaccins.
Pour ces deux derniers cas on parlera alors de CDMO pour « contract development and manufacturing organisation » (exemple : Catalent). En plus des questions purement industrielles, il y aura donc ici aussi des règlementations spécifiques liées au secteur du médicament.
Certaines de ces entreprises existent depuis très longtemps, d’autres ont fait les choux gras de la presse spécialisée car elles ont « levé » des sommes considérables. On peut citer par exemple Zymegen qui développe un film transparent et souple destiné à être utilisé dans des produits d’électronique grands publiques comme des téléphones portables pliables ou Gingko Bioworks qui a levé 600M$ en 2019, valorisant l’entreprise à plus de 4 milliards de dollars. (Note : Gingko a annoncé le 19 octobre 2022 l’acquisition de Zymegen)
Agrotech/Foodtech
Pour faire le lien avec la catégorie précédente, on peut commencer par citer les entreprises qui produise des additifs alimentaires comme certains arômes. Il y a aussi les entreprises qui se spécialisent dans les levures industrielles, par exemple pour la fabrication de bières ou de fromage. Les entreprises qui développent des plantes OGMs rentrent dans cette catégorie.
Plus récemment, on a commencé à entendre parler de « viande de laboratoire » ou « viande cultivée ». Il s’agit d’entreprises cherchant à produire de la « viande » in vitro (en laboratoire) donc avec l’objectif de se passer des élevages d’animaux. Pour ceux qui voudraient approfondir ce sujet, cet article de Labiotech est une bonne entrée en matière.
Diagnostic (Medtech)
Dans cette catégorie on touche directement à la santé des gens, en aidant les médecins à identifier les pathologies de leurs patients. Certains s’intéressent à la biologie médicale (les fameuses « analyse de sang »), souvent sans que le grand public en entende parler mais parfois de manière beaucoup moins discrète. On peut citer le cas célèbre désormais de « Theranos« , l’entreprise créée par Elizabeth Holmes qui promettait de réaliser un panel complet d’analyses à partir d’une simple goutte de sang. Malheureusement, l’histoire était trop belle et c’était purement et simplement une escroquerie. La chaîne « Hulu » en a d’ailleurs fait une série actuellement disponible sur DisneyPlus.
Parmi les multiples entreprises de ce secteur, il y a des géants comme Roche Diagnostics, Abbott, Eurofins Biomnis ou encore BioMérieux.
Au delà des analyses de sang, les entreprises de ce secteur développent des tests comme les désormais très célèbres tests antigéniques ou PCR, que chacun connait suite à la pandémie de Covid-19. Les entreprises d’imagerie (radios, scanner, IRM, échographie…) ou fabriquant des dispositifs médicaux comme les cathéters, les stents, ou les pompes à insuline par exemple, s’inscrivent aussi dans cette catégorie.
Les produits de ces entreprises sont généralement classés dans les dispositifs médicaux qui imposent des contraintes règlementaires lourdes quoi que sensiblement moins que pour les produits thérapeutiques. Les temps de développement et les risques de ne pas sortir le produit initialement imaginé sont aussi sensiblement plus faibles.
Une dernière précision : ces innovations sont régulièrement plus « tech » que « biotech » mais le domaine nécessite quoi qu’il en soit une connaissance excellente de la biologie et les clients de ces entreprises sont les mêmes que les biotechs thérapeutiques, c’est pourquoi on les classe aussi parmi les « biotech ». Le terme le plus fréquemment utilisé est « medtech » (pour medical device technologies).
Biotechnologies « outils »
Ici on retrouve toutes les entreprises qui proposent des outils qui servent à d’autres entreprises de biotechnologie, en particulier à celles qui développent des médicaments.
C’est peut-être le modèle d’entreprise biotechnologique le moins coûteux à développer. Les investissements sont généralement contenus, le délai avant de générer du chiffre d’affaire est court et les coûts fixes sont raisonnables. En étant un peu radical, on pourrait dire qu’à intérêt égal de l’innovation, ce qui fera la différence entre un échec, voir un demi-succès et un franc succès sera purement la qualité de la stratégie commerciale et marketing. Il est en effet souvent assez simple d’expliquer et de démontrer l’avantage qu’une « technologie » procure mais il est bien plus difficile de vaincre la force de l’habitude, de trouver les fameux « early adopters » et de les convaincre que les avantages de votre produit valent le prix que vous en demandez et l’effort (ainsi que le risque) de tester une nouvelle technologie.
Parmi une liste qui pourrait être très très longue, on peut citer les entreprises commercialisant des services de « découverte » d’anticorps monoclonaux (par exemple: Mabqi une société possédant des banques d’anticorps humains, MabSilico une société utilisant l’intelligence artificielle (la data science)) ou celles qui proposent de se passer de modèles animaux pour certaines étapes de la recherche (exemple : Inovotion qui propose de tester les molécules sur des embryons de poulet plutôt que des souris ou Emulate, une des sociétés qui proposent des « organes sur une puce » (organ-chips)).
Ces sociétés sont régulièrement à la frontière entre le commerce de « produits » (qu’on expédie pour qu’ils soient utilisés par d’autres) et de « services ». En effet, suivant les produits, il peut être intéressant de proposer de réaliser l’expérience avec le produit pour le compte du client. Les entreprises sont alors catégorisées comme « CRO » (pour Contract Research Organisation), c’est-à-dire un prestataire de service qui réalise une expérience pour le compte d’autrui. Certains produits imposent ce modèle comme lorsqu’une entreprise a développé une banque de tumeurs modèles (pour confirmer l’efficacité d’un candidat médicament sur ce type de tumeur). Si vous envoyez votre modèle de tumeur à un client, il n’aura plus jamais besoin de le racheter (il l’entretiendra chez lui), alors que si vous réalisez l’expérience à sa place il devra revenir pour chaque expérience.
Biotechs thérapeutiques
Dans ce blog on va s’intéresser essentiellement aux biotechs thérapeutiques. D’abord parce que ce sont celles que je connais le mieux, ensuite par ce sont celles qui sont les plus uniques dans leurs fonctionnements, avec la plus longue durée de développement avant d’espérer commercialiser leurs produits et le plus grand risque que ça n’arrive jamais. C’est aussi ce qui fait que son financement est encore plus spécifique et que d’ailleurs on ait parfois du mal à faire rentrer ces projets dans les formulaires des concours d’innovation (on y reviendra).
Le prochain article reviendra plus en détails sur les différentes approches scientifiques qui sont actuellement explorées par les biotech thérapeutiques.
On peut proposer une première définition un peu générique des biotechs thérapeutiques : il s’agit d’entreprises qui mettent à profit le génie biologique, et en particulier génétique, pour traiter des pathologies.
Récemment le terme s’est étendu, dans le domaine thérapeutique, à toutes les jeunes entreprises qui développe des médicaments innovants et on peut parfois trouver dans cette catégorie des entreprises qui développent des molécules obtenues par synthèse chimique (on aurait dit autrefois un « laboratoire pharmaceutique ») mais sur Doyoubiotech? on parlera principalement des entreprises qui produisent leur médicaments, au moins partiellement, dans des bioréacteurs.
Conclusion
Si vous êtes arrivé jusqu’à ce paragraphe final, soyez remerciés pour votre temps et votre attention. N’hésitez pas à me faire un retour dans la section commentaire. Je suis en particulier intéressé de savoir ce que vous pensez du niveau de détails dans cet article. Est-ce trop compliqué ? Voudriez-vous plus d’exemples ? Que pensez-vous de la longueur de l’article ?
Merci de m’avoir lu et à bientôt pour un post où je m’évertuerai à peindre un paysage des différentes approches thérapeutiques que permettent les biotechnologies.